mercredi, mars 21, 2007

Voutes/Coupoles/poutres/béton





























COUVERTURES, TOITS & VOÛTES.

suivi de DÔMES & COUPOLES.








Un ingénieur conseille un jeune ingénieur : « Peu importe que vous ne sachiez pas grand-chose ! Si au moins vous saviez être méfiant... »

Après le Paradis perdu par Adam et Eve, les hommes ont construit des maisons avec des poteaux et des branchages.
Par la suite, ils ont abattu des plus gros arbres.
Ils les ont mis debout, ils les ont appelés colonnes ; les poutres couchées et taillées se sont appelé entablements.
Progressivement la pierre a remplacé les colonnes en bois.
Cependant, les pierres ne permettaient pas de couvrir de larges espaces entre deux colonnes.
Les pierres sont lourdes et fragiles, quand elles sont placées couchées en hauteur en linteaux, elles peuvent casser en deux.
- « Dans l’Antiquité, ce n’était pas possible de rassembler beaucoup de people sous un même toit ! »
Dehors, il y a de l’espace. Quand il fait beau, c’est vraiment le meilleur endroit pour se rassembler.
Par exemple, les Grecs n’entraient pas dans les temples, ils en faisaient le tour en procession, ils vénéraient la grande statue d’Athéna chryséléphantine de la petite salle intérieure dans laquelle seuls les prêtres initiés entraient. Les plafonds étaient plats et en bois.


Depuis longtemps les hommes construisent des maisons pour se réunir.


Lorsque l’homme construit sa maison familiale comme un nid, il n’a pas besoin d’une salle bien grande, il a seulement besoin de quelques petites salles contiguës, ça dépend de sa fortune.
Lorsque qu’un chef veut rassembler sous un seul toit les habitants d’une ville ; il faut un grand espace pour être ensemble sous la même étoile.
La transaction et le commerce des marchandises nécessitent d’être bien au sec.
Le rassemblement d’une communauté religieuse aussi.

Depuis quand a-t-on des espaces assez grands pour organiser des marchés?

Depuis longtemps, les hommes sont capables de couvrir en bois de longs espaces, mais ils ne sont pas larges. On appelle ces longs espaces la nef; « nef » parce que, quand on lève la tête, la charpente du toit ressemble à une coque de bateau à l’envers appelée « nef », nommée aussi « vaisseau ».
Un arbre peut traverser un espace d’une dizaine de mètres, guère plus, ce qui est déjà beaucoup : installez quatre poutres de 10 mètres. Vous formez ainsi un carré en élévation soutenue par quatre piliers. Chaque fois que vous allongez un carré de 10 mètres, vous formez une travée. Le total des carrés forme l’espace appelé « la nef ».
Dans l’absolu on peut faire autant de travées que l’on veut l’une au bout de l’autre, mais, il y a une limite.
- « Si c’est trop long, on n’entend plus la voix de celui qui papote . Passe encore pour un marché aux grains! Mais pas pour un rituel liturgique, puisque tout le monde doit être au même diapason. »

Les Romains vont garder l’idée des travées, non plus horizontales et en bois, mais en pierre et en quatre demi-cercles.

Les Romains construiront des espaces voûtés (en berceau) en pierre qui ne permettront pas de rassembler plus de monde et plus de marchandises qu’auparavant, mais ces espaces auront l’avantage de ne pas inévitablement brûler un jour ou l’autre puisqu’elles sont en pierres.
C’est une invention très importante ! ça ne va pas de soi !
Les maçons ont eu l’idée d’organiser les pierres de telle sorte qu’elles forment un demi-cercle. Les pierres légèrement trapézoïdales (claveaux) se bloquent entre elles, les forces rejoignent le sol par la gauche et par la droite.
C’est très lourd !
Tenez quelques gros et grands livres ensemble sur une étagère, ils veulent tomber et pourtant ils ne sont pas chargés, bloquez-les avec un caillou à droite et un caillou à gauche ; ça tient ! Vous venez d’installer des contreforts ;
Les murs et les piliers peuvent ne pas résister au poids des pierres portées au plafond (les voûtains), il leur faut des beaux contreforts.
Levez la tête à vous rompre le cou et inspecter une voûte d’église romane en berceau non recouverte d’un enduit !
C’est prodigieux de penser que toutes ces petites pierres presque disjointes que l’on discerne au plafond pèsent chacune plus de 10 kilos.
Ces petits blocs ne peuvent pas s’ébouler sur votre tête ; il y en a pour plusieurs tonnes !
Elles ne peuvent pas tomber, elles sont coincées, mais si vous en enleviez quelques unes, tout s’écroulerait.
C’est ahurissant de penser à ces pierres disjointes qui sont auto bloquées à 47 mètres de haut pour une cathédrale gothique recordwoman !


Interlude : Les idées pour couvrir les espaces fermés sont ingénieuses.

1- C’est le moulage d’un sein d’Aphrodite, le gauche, qui a donné l’idée et la forme de la coupole de pierre.
2- En perçant les sombres cumulus, la lumière forme un puits de lumière pyramidal ; c’est ce qui aurait donné l’idée aux Égyptiens la forme des pyramides de pierre.
3- Le Corbusier avait toujours une carapace de crabe sur son bureau, il semble qu’il s’en soit beaucoup inspiré pour dessiner le toit de la chapelle de Ronchamp.
4- Shigeru Ban, le lauréat du concours du futur Centre Pompidou de Metz, fera construire le musée en s’inspirant de la structure d’un chapeau chinois.


Retour sur pierre.

Les Grecs n’ont pensé qu’aux pierres et aux poutres en bois installées horizontales pour couvrir les espaces. Ce sont les Romains qui ont eu l’idée des voûtes en pierre.
La pierre est éternelle, le bois s’enflamme. Il faut allumer des bougies pour éclairer une nef ; inévitablement le plafond brûle et avec lui l’église entière, le mieux est qu’elle soit en pierre, c’est indiscutable !
Une voûte de pierre doit être couverte d’un toit parce qu’elle n’est pas étanche à la pluie. Il faut la couvrir d’une charpente de bois en triangle isocèle qui est lui- même couvert de tuiles ou autres matériaux.
Notre-Dame de Paris a été couverte d’un toit avant qu’on installe la voûte de pierres quelques décennies plus tard.

Mieux qu’une voûte de pierre de 13 mètres de largeur au maximum, ce sont les poutres en béton qui vont être les plus efficaces pour couvrir un grand espace pour les foules. On peut de nos jours faire une poutre de 100 mètres de long, c’est le cas de celles de la Grande Arche de la Défense à Paris.

À Athènes, en 450 av J.C, une grosse pierre de 3 mètres de long posée sur deux chapiteaux aurait cassé en son milieu si on l’avait chargée pour monter un étage.
En son milieu, cette longue pierre est sujette à son propre poids, elle peut même casser par sa seule densité.
Pas d’étage possible !
Prenez trois morceaux de sucre, mettez-en deux debout le plus éloigné possible, le troisième étant couché sur ces deux sucres verticaux, c’est ce que l’on appelle le système de la trabéation. Si le sucre couché était deux fois plus long, il casserait facilement en deux en appuyant dessus.

Si l’on réussissait à insérer quelques tiges d’acier dans la partie inférieure de ce bloc de sucre ou de pierre, il résisterait à une très grosse charge.
Ces tiges d’acier résisteraient à la traction à droite et à gauche, la pierre ne pourrait plus se casser en deux parties, les Grecs auraient fait des étages.

Il est évidemment plus facile d’intégrer les tiges métalliques dans la partie inférieure d’un moule (coffrage) et d’y couler du béton liquide. C’est cela le béton armé !

Le matériau de construction le plus intéressant aujourd’hui est bien évidemment le béton armé ; c’est de l’imitation de pierre traversée par des barres d’acier.

Le béton armé est presque étanche, il ne brûle pas, il résiste quand on l’étire, on dit qu’il résiste à la traction.
Le béton armé réunit à la fois les qualités de compression de la pierre et les qualités de tension de l’acier, il peut être coulé selon toutes les formes. Il laisse à l’architecte une grande liberté dans la conception structurale.
C’est un matériau économique, que l’on se procure facilement.
Le béton est un mélange de ciment, de sable, de cailloux broyés et d’eau.
L’eau et le ciment forment une pâte entre les grains de sable et les graviers. Après quelques jours, cette pâte de ciment durcit, il est dit que « le béton prend ». Après quatre semaines, le béton a acquis sa résistance maximale équivalente à celle de la plupart des pierres les plus dures. Les dosages pour fabriquer le béton sont définis par des laboratoires spécialisés.

Depuis le XXe siècle, nous savons donc fabriquer de la pierre très solide, mais ça n’a aucune utilité puisqu’on en trouve dans la nature.
« - Il y a bien quelques avantages à fabriquer ce mortier ? »

Il y a trois raisons avantageuses à utiliser le béton.

1- Premier argument.
Pour monter un rocher de 30 tonnes à des dizaines de mètres de hauteur, c’est très difficile, même au XXI e siècle. Alors que le béton, à l’état pâteux peut être monté par aller-retour régulier dans un gros récipient à la hauteur désirée. (Pour comprendre ce qu’est 30 tonnes, il faut avoir vu un gros morceau de granit transporté sur un camion ; il n’est pas bien gros, un parallélépipède de quelques mètres de côté que l’on fait venir d’Afrique par bateau.)
2- Deuxième argument.
On peut couler le béton dans n’importe quel moule préfabriqué; il est plus difficile de tailler une pierre à la forme que l’on veut.
3 - Troisième argument, le plus important, on peut intégrer de l’acier dans le béton pâteux. (L’acier est un alliage de fer et de carbone, c’est super solide, et plus souple que le fer.)


C’est parce qu’elle est traversée par des tiges d’acier que cette invention devient géniale !

Le ciment n’est pas une invention récente, ce sont les Romains qui l’ont utilisé les premiers.
(Le ciment ordinaire se prépare en calcinant un mélange de calcaire et d’argile broyée.)

En revanche, le béton armé est une invention récente.



- Lorsqu’un matériau est chargé, on le dit en compression.
Une colonne de marbre, en béton ou en pierre calcaire pourrait atteindre une hauteur de 3 600 mètres avant de se briser en compression sous son propre poids, alors que de la pierre plus dure, comme le granit peut atteindre environ 5500 m .

Malheureusement, la pierre et le béton résistent mal à la traction, on ne peut les utiliser que pour des colonnes ou des arches qui ne subissent pas de contraintes de traction.

La pierre et le béton sont mal adaptés à la fabrication des poutres horizontales qui développent à la fois tension et compression.

Lorsqu’un matériau est tiré, on dit qu’il subit une contrainte de traction.
On ne peut pratiquement pas étirer, étendre une barre d’acier ; quelques barres d’acier vont donc empêcher la pierre de se couper en deux.
On peut faire mieux encore ; il est possible d’étendre un peu les tiges d’acier avec une machine, on peut gagner quelques centimètres. Il faut garder ces tiges d’acier tendues et couler du béton. Attendre quelques semaines et enlever la machine qui étire la ferraille, vous avez une poutrelle qui se courbe légèrement, c’est cela le « béton précontraint ». Lorsque l’on installera cette poutre légèrement courbée entre deux murs, elle se mettra droite au lieu de fléchir lorsqu’elle n’est pas précontrainte.




Le but de la structure est de conduire les charges jusqu’au sol. Ce travail est le même que celui de l’eau canalisée; poteaux, poutres, câbles, arches et autres éléments structuraux agissent comme des tuyaux pour la descente des charges.
Une structure choisira toujours de conduire ces charges jusqu’au sol par la voie la plus simple possible.
Naturellement, plus la construction est importante, plus il y a de contraintes et plus le travail devient complexe.



L’architecture est un heureux compromis entre l’art et la technique, mais c’est la technique qui décide des formes qui deviennent artistiques quand l’architecte profite des capacités intrinsèques des matériaux.



DÔMES & COUPOLES.

(Le premier terme désigne l’extérieur, le deuxième l’intérieur.)

Un super stade peut contenir 20 000, 40 000 voire 100 000 personnes.
Les dômes et les coupoles sont peut-être la matérialisation la plus approchante des cieux, les seules représentations du ciel faites de main d’homme.
Et c’est pourquoi un dôme semble nous protéger comme le ciel d’une nuit claire, nous embrasser, nous et notre petitesse, nous et notre solitude.
Le dôme n’est pas toujours le soutien gorge gauche d’Aphrodite, pour certains elle est la voûte des cieux !
Puisque le dôme n’a aucun système pour le maintenir par l’intérieur (les tirants) et aucun système apparent pour le soutenir par l’extérieur (arc-boutant), il est évident que le dôme n’est pas qu’une simple série de voûtes disposées sur un cercle, juxtaposées les unes par rapport aux autres, c’est bien plus compliqué.



Le plus grand dôme de l’Antiquité, dédié à tous les dieux, fut construit par les Romains en 123 après Jésus-Christ ; il est toujours là à Rome !
Le Panthéon ne pouvait être conçu et réalisé qu’après la découverte du béton de pouzzolane par les Romains. Ils furent les premiers à lever de grandes structures monolithiques et à surmonter les difficultés des grandes portées.
Les dimensions du dôme du Panthéon sont extraordinaires tant par leur géométrie que par leur épaisseur.
Son diamètre intérieur est de 43 mètres, un peu moins qu’un grand bassin de piscine.
Son épaisseur minimale au bord de son lanternon, donc en haut, est de 61 cm ; son épaisseur maximale à la base est de 7,20 m, plus large qu’une salle de classe.
Pour éviter de couler du béton trop lourd sur un coffrage horizontal au sommet du dôme, l’architecte a laissé un oculus de 9 m de diamètre.
Le rebord de cette ouverture horizontales était constitué de briques à haute résistance, soigneusement soudées par un excellent mortier qui devait résister à une forte compression en agissant comme la clé de voûte commune à tous les arcs du méridien du dôme.
Il y a donc un trou de 9 mètres de diamètre dans le plafond, c’était impossible de le boucher même avec des pierres ponce légères! Il pleut à l’intérieur du Panthéon.

Pendant 1300 ans, le diamètre du Panthéon n’a pu être surpassé jusqu’à ce que le dôme octogonal de la Sainte-Marie de la Fleur de Florence y parvienne de 91 cm seulement.
Lorsque vous irez à Rome installez-vous quelques minutes sous cet oculus de 9 mètres qui ne les fait pas quand on 30 mètres plus bas.


En 1418 à Florence, on lance un concours.




Les murs qui devaient soutenir la coupole avaient une forme octogonale ; on appelle cet espace le tambour ; il mesure 43 mètres et 91 centimètres en son diamètre. Personne ne savait comment on allait réaliser une coupole sur ce tambour.

« La construction du dôme était si grande qu’elle ne pouvait être achevée et que c’était de la naïveté de la part des premiers maîtres d’œuvre est de toute autre personne ayant débattu de l’affaire d’avoir cru que c’était faisable.»

L’idée d’un échafaudage ou d’un cintre en bois capable de supporter une structure aussi monumentale durant sa construction avait toujours paru utopique aux experts de l’époque !
Il faudrait beaucoup trop de poutres, il aurait fallu décimer les forêts avoisinantes.
Pourtant, par sage précaution, l’on a construit des parois d’une épaisseur de 4,25 m pour le tambour, mais le coût d’un seul cintre en bois était un obstacle au projet.

À 24 ans, Brunelleschi gagne le concours. Il trouve un système pour construire le dôme sans cintre. Impensable !


Si l’on monte la coupole sans se servir d’un moule en bois que l’on enlèverait par la suite ( un soutien-gorge intérieur), comment mettre les dernières pierres qui bloquent l’ensemble (les clés de voûtes)?
Comment les pierres tiendraient-elles en attendant les clés qui bloquent?
Les dernières rangées de pierres pencheraient dangereusement vers l’intérieur lorsqu’elles atteindraient le haut.
Bien évidemment, on ne peut pas réaliser un anneau de pierres instantanément !



L’idée de Brunelleschi est de monter les rangées en spirales.
Travaillez avec trois briques posées horizontales puis, mettez-en une verticale, puis trois horizontales et une verticale. Faites un tour de 43 mètres de diamètre, puis deux tours et ainsi de suite en spirale, ça montera progressivement. Le temps de prise du mortier étant plus court que celui nécessaire à poser un nouveau tour complet de briques, chaque rang incomplet en cours d’exécution était toujours bloqué (claveté) aux trois rangs inférieurs qui présentent à chaque fois des briques à plat et hérissées ; l’ensemble qui monte s’enchevêtre…
C’est vraiment très fort, mais il faudrait entrer dans les détails pour bien comprendre ou faire quelques schémas.

Plus grand !

Une des plus grandes couvertures d’une seule portée qui ait été construite jusqu’à nos jours est le dôme de béton à base triangulaire du Centre National des Industries et des Techniques de Paris (CNIT), conçu en 1968. Il consiste en trois énormes arcs-boutants jaillissants des angles d’un triangle équilatéral et se rejoignant au milieu du triangle. Les côtés du triangle mesurent 219 m et se rencontrent au milieu à 46 m au-dessus du centre du triangle.
Les trois arcs-boutants, comme les trois bâtons d’une tente d’indien se tiennent par le haut. Ces trois morceaux de béton sont constitués d’un double dôme composé d’une coque inférieure et d’une coque supérieure d’une épaisseur de 6,35 cm de béton seulement.
J’ai bien écrit 6,35cm !



Le CNIT, admirable vaisseau de béton conçu comme une voûte d’arêtes sur plan triangulaire de 218 m de côté, dont la rénovation actuelle fut un massacre ; quelqu’un a fait entrer un grand camembert de verre dans ce grand triangle équilatéral ; le mal est fait, il est impossible de voir ce chef d’œuvre correctement de l’intérieur





B.A BA.

Si l’on veut faire une belle voûte en pierre, la bonne cave souterraine d’une ferme, il faut procéder avec méthode.
Comment faire tenir les pierres en berceau pendant la construction?
Il faut placer un coffrage sur lequel on va placer les pierres inclinées en attendant d’installer la rangée du dessus qui bloquera l’ensemble. Ce coffrage s’appelle le cintre.

Si l’on rassemble de la neige en grande quantité et que l’on creuse une cavité à l’intérieur on n’est pas du tout en train de faire une voûte.
Nous avons essayé avec des blocs de neige bien gelés mais non taillés en pavé.
La neige colle, c’est un avantage, cependant, il n’est pas possible de monter les blocs les uns sur les autres et arriver à une demi- sphère correcte ; la plupart du temps, les blocs montent en formant un cône et nous n’avons pas pu les faire pencher vers l’intérieur.
Nous venons de construire une voûte à encorbellement.

C’est le cintre qui décourageait les constructeurs des premières églises souterraines de l’époque carolingienne ; ce fut le cas pour l’église souterraine de Remiremont (Vosges).
Le cintre décourage parce qu’il faut abattre beaucoup de bois, qu’il faut le tailler et ensuite tout enlever, ça coûte cher !
Les paysans procédaient ainsi; il laissait la terre en forme de selle de cheval et ils y installaient les pierres en voûte, en berceau. Lorsque toutes les pierres étaient installées, bien calées, il était possible d’enlever la terre, et la cave était prête à recevoir les légumes et le bon vin.
Si vous n’êtes plus sous le terrain, mais sur le sol, il est possible de faire un monticule de terre en forme de demi-cercle et d’y installer les pierres par-dessus, mais ce n’est pas très précis. Il est préférable de prendre du bois.
Lorsque l’on arrive dans une ville qui possède une cathédrale, on peut deviner bien avant d’arriver dans cette ville qu’il a eu de gigantesques voûtes construites car les forêts environnantes étaient décimées.
Il faut vraiment beaucoup de bois pour confectionner les cintres d’une grande cathédrale.



En 1163, commence l’édification de Notre-Dame de Paris, construction record qui aboutit à une voûte de 35 m depuis la surface du sol.
En 1194, celle de Chartres dépassent Paris en atteignant finalement 36 m.
En 1212, commence la construction de celle de Reims qui doit s’élever à 35 m.
Et en 1221 celle d’Amiens atteint 42 m.
Cette course record atteint son apogée en 1247, avec le projet d’élever le cœur de Beauvais à 47 m au-dessus du sol, mais les voûtes devaient s’effondrer en 1284.

Cependant, c’est la largeur de la nef qui est le plus important. Mais pour élargir, il faut monter pour renvoyer les charges au sol le plus loin possible avec les arcs-boutants. les architectes montaient de plus en plus haut sans que l’édifice s’élargisse vraiment beaucoup.
Les nefs les plus larges mesurent 13 mètres.
À cela il faut ajouter les deux espaces de droite et de gauche, les collatéraux, qui mesurent chacun 9 mètres, ce qui fait une largeur de 31 mètres. Il ne faut pas oublier qu’il y a d’énormes piliers entre la nef et les collatéraux ; des piliers qui empêchent d’avoir une vue dégagée sur l’ensemble de ce grand espace de 100 mètres de long qui pouvait contenir des milliers de personnes debout.




Les origines des architectes sont diverses.

Shigeru Ban est japonais, il a découvert l’architecture japonaise à travers certaines constructions américaines. Il voyage beaucoup, c’est à Paris qu’il a acheté et bien observé un chapeau chinois fait de tiges de bambou latté.
Dans l’Antiquité, les Égyptiens construisaient leurs pyramides égyptiennes, les Romains leurs amphithéâtres romains, les Grecs leurs temples grecs, les vaches étaient bien gardées. Aujourd’hui les architectes ont les ailes d’Hermès :
Le grand architecte qui a eu l’idée de la pyramide du Louvre est d’origine chinoise, mais il est américain. L’architecte qui construit actuellement l’Opéra de Beijing (Pékin) est français.
Celui qui a construit la grande Arche est danois. Le Centre Pompidou a été construit par un italien et un anglais.
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vendredi, mars 09, 2007

Dadaisme/Surréalisme

































Il faut savoir ce qu’est le Dadaïsme avant de parler du Surréalisme.


En 1916, dans un cabaret à Zurich en Suisse, Tristan Tzara un jeune Roumain et quelques autres pètent complètement les plombs parce qu’ils haïssent la guerre qui fait rage à Verdun.
60 000 milles morts en un jour, record battu !

Dans ce cabaret, ils font des spectacles qu’on ne peut ni entendre, ni comprendre, ni lire puisqu’ils détruisent tout ce qui est fait.
« Il y en avait un qui hurlait ses poèmes de plus en plus fort, pendant que l’autre (Hans Arp) frappait sur une grosse-caisse de plus en plus fort aussi.»

Dada, deux syllabes tirées du dictionnaire, qui forme un mot de bébé…
Le groupe Dada est contre tout.
Ils disent « non » à tout. Ils délirent ensemble. Ils provoquent la bourgeoisie.
Ils ne veulent rien faire, rien construire, l’époque est trop malade. Tout fiche le camp.






Paris 1924.

Quelques années après la terrible guerre des Poilus dans les tranchées, ça allait mieux !
Des monuments aux morts sont installés dans tous les villages.
Le cinéma en était à ses débuts, il était encore muet, il deviendra parlant en 1929.
La photographie est une grande dame de quatre-vingts ans.
La télévision ne sait pas encore qu’elle envahira toutes les maisons à partir de 1970.

À Paris, une bande de joyeux copains rigolent bien.
Ils sont jeunes, ils ont survécu à la guerre, ils font beaucoup de bruit, ils se rencontrent dans certains cafés : le Grillon et le Cyrano
C’est le groupe des Surréalistes autour d’André Breton, un groupe beaucoup plus constructeur que le groupe dadaïste. Certains ont fait partie des deux groupes, Hans Arp.
Ils aiment tous le cirque, les cinémas populaires.
Ils se baignent nus dans les fontaines de Paris.
Ils insultent les curés.
Ils aiment bien se rendre aux spectacles les plus stupides plutôt que de fréquenter les salons où l’on fait des choses artistiques plus sérieuses.
Qui aurait pu dire en 1924, qu’ils seraient considérés aujourd’hui, au XXIè siècle, comme les meilleurs poètes et les meilleurs peintres de cette époque ?
Ceux qui fréquentaient les salons sérieux de 1924, on ne s’en souvient plus !

Ils formaient un groupe d’une dizaine, ils ont pris le nom de "Surréalistes".

Dans l’expression « SURREALISTE » Il y a le mot « réalité », devant lequel ils ont ajouté « SUR », c’est à dire « au-dessus », « au-dessus de la réalité.»
Ou bien, « plus fort que la réalité. »
Ou encore, « la réalité, celle que l’on voit tous les jours n’est pas toujours rigolote, il y a des jours où il y en a marre, il faut voir autre chose, dire autre chose que ce que l’on dit d’habitude.»
Dire par exemple ; « Le cadavre exquis boira le vin nouveau. »
Voir une grosse marmite de laquelle sort un gros tuyau qui pendouille, et dire ; « c’est un éléphant célèbre. » Ça y ressemble non ?
C’est Max Ernst qui voit cela et il le peint en y ajoutant des détails.
C’est plus que la réalité !
Dans les rêves de nuit, on voit quelquefois des personnes et des objets qui nous surprennent. On ne pourrait pas les dessiner facilement.
Oui ou non?
Le groupe décide que c’est précisément cela qu’ils vont essayer de dessiner.
Ils en avaient marre de la peinture de cette époque ; des scènes religieuses, des batailles, les belles couleurs de la nature des Impressionnistes, ras le bol des bouquets de fleurs.
Après la guerre, les champs de coquelicots, même bien peints, ça les agaçaient.
Le Cubisme aussi était moribond… La coupe était vide. C’était comme s’ils avaient voulu faire boire du pétrole aux spectateurs. Les peintures abstraites de Kandinsky se portaient bien Néanmoins la peinture moderne n’était pas encore aimée et connue de beaucoup.
Les Surréalistes semblent ignorer le cubisme finissant et la peinture abstraite grandissante.


En 1924, le groupe de Surréalistes ne sait pas encore qu’il va changer notre manière de voir les choses.
Les Surréalistes pensent qu’il est plus important d’associer des mots et des images sans réfléchir à ce qu’ils veulent dire, que de respecter les règles apprises à l’école. Ils sont convaincus qu’il faut laisser faire la pensée seule pour dire des choses nouvelles comme lorsque l’on rêve la nuit.
Il faut donc, vouloir essayer de faire dérailler la raison de jour comme de nuit et avec certains moyens qu’il ne faut pas vous recommander, comme la drogue pour les hallucinations et la pratique de l’hypnose qui peut-être dangereuse.
Ils avaient aussi des moyens qu’il faut vous recommander pour obtenir des associations d’idées difficiles à trouver.
Le plus connu est le « Cadavres Exquis. » Ces deux mots se sont télescopés par le hasard des pliages d’une feuille de papier. Dans un bistrot parisien le groupe écrit des mots qu’il cache en pliant les feuilles, ainsi le suivant ne sait pas ce que le précédent à écrit. Quand on déplie le papier, les phrases peuvent êtres belles et toujours inattendues : l’exemple le plus fameux a déjà été cité :

« Le cadavre exquis boira le vin nouveau. »

Ce hasard leur a beaucoup plu, les mots ne vont pas ensemble, un cadavre ne peut pas boire ! Ils ont décidé d’appeler ce jeu, le jeu du cadavre exquis.
Ce jeu se fait aussi par le dessin, la feuille est pliée chaque fois qu’un dessinateur prend le crayon. Quand elle est entièrement pliée, on la déplie et l’on regarde le résultat qui à chaque fois surprend et fait sourire.

Les Surréalistes veulent changer la vie et la société ; il faut dire qu’après une guerre comme celle qui venait de finir il n’y avait pas de quoi être fier.
Pour changer la vie, André breton et son groupe s’appuient sur les recherches de deux personnes plus importantes que lui : Marx et Freud.




Freud découvre qu’il y a une partie de nous-même que l’on ne connaît pas. ça change ce que l’on croyait jusqu’ici, puisque l’on était certain de tout décider nous-même : embêter sa grande sœur ou de ne pas dire bonjour à sa grand-mère, etc. Eh bien non ! Souvent, il y a un truc plus fort en nous qui décide pour nous.
Freud essaye de trouver des explications en analysant les rêves de chacun.

Les Surréalistes aiment beaucoup les travaux de Sigmund Freud et les idées de Karl Marx.
Marx est certain que les ouvriers sont exploités par les patrons et qu’ils en sont même les esclaves modernes. (Moderne, puisque l’esclavage des noirs n’existe plus depuis peu.)
Il fallait préparer la révolution, il y en avait déjà une en marche en Russie et une autre en Allemagne.
Elle se préparait partout ; après une telle guerre, les ouvriers ne faisaient plus confiance aux marchands d’acier et de canons, c’était facile d’espérer mieux.
Heureusement pour nous, les surréalistes étaient plus une bande de blagueurs intelligents qu’un groupe de poseur de bombes. Ils espéraient la révolution par le changement des comportements et, d’une certaine manière, ils y sont arrivés puisque nous aimons bien lire ce qu’ils ont écrit, jouer à leurs jeux et nous adorons leur peinture, surtout celle de Salvatore Dali et celle de Juan Miro qui faisait partie du groupe. Dans les écoles, tout le monde aime bien Miro.
André Breton disait que c’est peut-être « l’enfance qui approche le plus la vraie vie. » Il pensait que c’était durant cette période que l’on était « en pleine possession de soi-même », et ça l’énervait d’être un adulte avec des mauvaises habitudes d’adulte à cause de son éducation trop sérieuse…
Mouais…


C’est vrai que c’est dommage de se sentir retenu, dans ses gestes en peinture, en chant, en poésie quand on est adulte, mais c’est lamentable quand on invente de belles armes de boucherie.
Les Surréalistes opposent le non contrôle de la pensée libre à un extrême contrôle de la pensée qui, bien évidemment, empêche d’inventer la rêverie et la poésie.
Ne croyez-vous pas qu’il faille apprendre à alterner les deux, quand on veut, suivant les circonstances ! c’est la base de l’enseignement des arts.
« Écrivez dans l’ivresse*, relisez-vous à jeun. » Guillaume Apollinaire*.
Cette phrase veut dire ; « Ne contrôlez rien, lâchez-vous, puis contrôlez tout, passez tout au peigne fin. »
*Il n’est pas question de l’ivresse de l’alcool, mais d’allégresse.
*Dit en passant, c’est ce grand poète Apollinaire qui a trouvé le mot « surréel ».



Autres jeux surréalistes recommandables et réalisables.


1- André Masson réalise des dessins automatiques. Il fait tout un réseau de lignes à l’encre de Chine. Il fait le vide en lui-même. La plupart du temps, les lignes ne s’associent pas, comme si elles ne pouvaient pas ou ne voulaient pas former un dessin. Le résultat est déroutant, faire du graphisme de cette manière rappelle ce que l’on fait quand on téléphone. C’est grâce à André Masson et aux surréalistes que l’on n’est pas risible quand on dessine machinalement, presque automatiquement.
Ça faisait du bien à André Masson de dessiner de la sorte, il revenait du Chemin des Dames. Ce chemin n’avait rien à voir avec les dames, c’est seulement le nom d’un lieu d’une des plus grandes batailles de la guerre de 14/18. Il a survécu, alors qu’il y avait des milliers de morts tous les jours. Il a eu de la chance, mais il a gardé des marques profondes dans son intérieur, c’est certain que ça lui fait du bien de « plonger au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau. » C’est ce que demandait Apollinaire, « plonger », on dirait maintenant « se lâcher. »

2- Jean Arp découpe dans du papier des formes très travaillées et laisse tomber à terre les chutes qui devraient finir dans une poubelle. C’est à ce moment-là qu’il décide de se désintéresser de ses bonnes découpes et de ne s’occuper que de celles qui sont tombées à terre et réaliser une composition nouvelle. Étonnant non ?
3- Un autre artiste peint dans le noir pour ne plus contrôler du tout sa peinture.
4- Allumer une bougie et déposer du noir de fumée sur une feuille que l’on tient au-dessus en faisant attention de ne pas brûler la feuille de papier. Regarder le résultat, et compléter en y ajoutant deux yeux ou une queue,etc.
5- Les papiers déchirés et collés qui forment d’autres images et d’autres mots.
6- Introduire un mot banal dans un texte littéraire très châtié.
7- Man Ray mettait des objets directement sur le papier photographique, il appelait cela les rayogrammes.
« Il disait, je ne suis pas un photographe, je suis un fautographe. »

Les Surréalistes ont pratiqué tous les arts et bien sûr le cinéma.

8- Max Ernst est sans doute le plus inventif, un écrit lui a déjà été consacré.
Mais pour résumer ;
• Les frottages sur des planches de bois et tous ce qui peut laisser une marque par frottage et transfert sur le papier.
• Les « décalcomanies » de Max Ernst ; mettre de la peinture à l'huile assez fluide sur un papier comme sur une tartine, puis retourner la tartine sur sa toile et la faire glisser. La retirer d'un coup, elle laissera des traînées de couleurs compliquées qu’il est possible de retoucher.
• Le grattage dans les couches de peinture pour découvrir ce qui est en dessous.
• Les photomontages avec des images gravées et découpées
• Max Ernst a inventé beaucoup de techniques qui l’ont surpris et qui lui ont fait voir les choses autrement. C’est moins surprenant pour nous aujourd’hui parce que nous utilisons ses techniques assez couramment, mais c’est grâce à lui.





C’est en partie grâce aux Surréalistes que l’on peut faire des choses qui ne servent à rien, des choses indispensables à faire pour se sentir bien dans notre corps exquis.
Pour être un peu poète, pour être un débutant peintre, pour être un petit photographe, pour être un mini cinéaste ou un apprenti musicien, il faut se lâcher, il faut se renouveler, c’est cela que les Surréalistes nous ont appris.